Vanessa Seward by night
“Le film After Hours, de Martin Scorsese (1985), m’a beaucoup marquée. Je l’avais vu, adolescente, alors que je sortais déjà énormément. J’aime cette image de la nuit où, d’un coup, tous les codes peuvent basculer. Là, c’est flagrant : on passe dans un monde parallèle qui s’arrête au matin, quand le héros se retrouve à son bureau. Ça me rappelle les années 1980, où on enchaînait les fêtes, où avoir un look suffisait pour être accepté. D’ailleurs, la chanson à laquelle je pense pour parler de la nuit date de cette époque : Épaule tattoo, d’Étienne Daho, raconte aussi tout ça. L’autre thématique de la nuit qui me plaît, son côté mystérieux et rebelle, effrayant et attirant, se trouve dans un court-métrage de F ellini, Toby Dammit (dans la comédie à sketchs Histoires extraordinaires, en 1968, ndlr), avec Terence Stamp (1), qui a vendu son âme au diable et qui roule dans la nuit… Tout cela fait directement écho à une chanson de B ertrand Burgalat, Très Grand Tourisme (dans l’album Toutes directions, en 2012), qui parle du fait de rouler dans la nuit sans but (2). Cela me fascine… Moi qui ne dors pas bien, j’aime dans ce moment qu’il n’y ait plus de contrainte d’heure, on peut errer sans but, personne ne nous attend… Quand on est créatif ou contemplatif, la nuit est géniale. C’est lors de ce moment que j’ai le temps de réfléchir. La nuit, ce sont aussi les étoiles, j’aime bien les images étoilées. Je pense à des photos de Catherine Deneuve par Bert Stern. Et aussi à la couverture du disque de Claudine Longet, Let’s Spend the Night Together (3), qui a inspiré mon imprimé ‘Nuits étoilées’, réalisé par l’artiste américain Jason Glasser (4). Quant au livre qui m’évoque le plus la nuit, c’est Dracula (5) de Bram Stoker. Cette histoire m’a fascinée dans l’enfance et a un peu terrorisé mes nuits. D’ailleurs, il y a un personnage appelé docteur Seward, nom pourtant rare ! C’est ce mélange d’attraction et de répulsion qui m’intrigue. Autre roman culte, lu et relu mille fois : Tendre est la nuit. J’adore F. Scott Fitzgerald et sa vision de la nuit, ce gouffre entre légèreté et malêtre, où rencontres et séduction se jouent avec des cartes à chaque fois mélangées à nouveau…”