Pop Culture

Trois livres XXL pour vous accompagner tout l'été

Vous ne voulez emporter qu’un livre dans vos valises ? L’Officiel vous propose ses coups de foudre littéraires, avec trois classiques modernes format xxl pour vous accompagner toutes les vacances. 

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Trois romans uniques, magistraux, par leur ton, leur puissance stylistique, leur singularité irréductible, la déflagration émotionnelle ressentie à leur lecture. Fidèles à la formule de Kafka énonçant qu’ "un livre doit être la hache qui brise la mer gelée en nous.", ils semblent animés par la volonté de rendre la vie encore plus vivace, donner aux sentiments une réalité insoupçonnée et aux émotions une densité inouïe. Des livres précieux, à lire, relire, à offrir à ceux ou celles, rares comme des diamants, qui tiennent en haute estime les vertus consolatrices et édifiantes de la beauté, à ceux et celles qui croient en la devise de l'immense chanteur brésilien, Cætano Veloso :  "Le plaisir rend intelligent et l'intelligence rend heureux."

Une vie comme les autres.

Fresque à la dramaturgie opératique, tendance Verdi, ce livre se dévoile avec pudeur, une prudence émouvante, une patience attentive, comme si l’autrice aimait tant ses personnages brisés qu’elle cherchait, par l’ampleur du texte, à recoller les morceaux de ces vies comme les autres, ces vies minuscules que raconte magnifiquement Pierre Michon dans son sublime livre Vies Minuscules - à l’image de la technique japonaise du kintsugi, restaurant porcelaines ou céramiques au moyen d’une laque saupoudrée d’une poudre d’or. Il dresse les portraits de quatre amis, Willem, Malcolm, JB et Jude, l’inoubliable Jude. Yanagihara ne cherche jamais à épater la galerie par sa capacité à multiplier les intrigues, son agilité narrative, les sauts temporels ou les rebonds narratifs. Son regard, aussi terrifié qu’aimant, est le nôtre, en découvrant ces trajectoires filant, de plus en plus inexorablement vers le désastre, à observer leurs ambitions - aussi bien celles de s’arracher au déterminisme que l’aspiration à la gloire, ou, du moins, à la reconnaissance, aboutir ou s’échouer dans la vase. On taira bien sûr le dénouement, mais disons simplement qu’il témoigne autant d’une extraordinaire capacité à rendre immédiatement sensibles ses personnages - en tournant les pages, l’on sent leur épiderme déchiré, leur intimité fracassée, leurs tourments vertigineux, comme l’on écouterait attentivement, avec reconnaissance, une reconnaissance émue par la confiance accordée, les confidences murmurées par les êtres aimés - que d’une écriture sidérante d’agilité. Peu de livres de récente mémoire témoignent d’autant d’amour compréhensif pour les âmes blessées qui cherchent l'amour autant qu'elles le redoutent, évoquées par le poète Henri Michaux « Je suis né troué, ce n’est qu’un petit trou dans ma poitrine, mais il y souffle un vent terrible. » Et surtout, en renfermant le livre, larmes aux yeux, l’on pense à la première phrase du texte que le critique Serge Daney avait consacré au film Paris, Texas de Wim Wenders :  "Une bêteil faudrait être une bête pour ne pas être ému par la dernière scène de Paris, Texas." 

Un livre de Hanya Yanagihara (Le Livre de Poche, 1128 pages).

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Une histoire d’amour et de ténèbres.

Un des plus grands écrivains israéliens, engagé dans le mouvement « La Paix,Maintenant », disparu en 2018, signe là son chef d’œuvre, celui qui porte avec force l’extraordinaire puissance de sa voix, quasi Biblique, dans sa capacité à faire sortir de terre le réel, par la force du style. Dans ce récit personnel, Oz raconte une histoire comme mille, celle de sa famille, celle de l’Histoire tragique, remontant aux origines, à l’Ukraine, la Lituanie, jusqu’à Jérusalem, avec une vigueur quasi homérique. Ce texte foisonnant, oscillant entre confession intime et la geste lyrique, aux personnages profondément attachants, au ton mêlant la douleur du deuil impossible d’une mère tôt disparue, prosaïsme de la pauvreté, profondeur du champ lyrique, humour sec, est un voyage, au cœur, précisément de l’amour et des ténèbres, dont l’on ne ressort pas indemne. En racontant la naissance d’Israël et celle de sa vocation d’écrivain, sans faire l’économie d’une certaine violence, voire de cruauté, Oz signe un de ces livres fondateurs, de ceux qui accompagnent, justement, toute une vie, parce qu’il parvient, miracle des miracles, à l’embrasser toute entière, dans sa complexité, sa beauté, sa poésie imprévue, sa crudité injuste, ses bonheurs minuscules et les malheurs dont l’on ne se remet jamais - cette quête impossible de l’harmonie tend un miroir dans lequel chacun-e se reconnaîtra. 

Un livre de Amos Oz (Folio, 864 pages).

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Blonde.

Moins une biographie linéaire de Marilyn Monroe, qu’une sublime variation proche de la démarche des jazzmen revisitant des mélodies jouées mille fois avant eux, autour de sa personnalité, une digression fantastique (dans tous les sens du terme) inspirée par son histoire, Blonde, par son génie polyphonique, sa capacité à faire tenir ensemble intrigues et pensées, songes à la dérive et récits factuels, empathie et distance, poésie rêveuse et prose sèche, tout en clair-obscur, un des plus beaux livres de son autrice, obscurcit l’idée que l’on se faisait de l’actrice-icône d’un voile mélancolique, effaçant tous les préjugés qu’elle pouvait inspirer. Mais c'est moins de Monroe qu'il est peut-être question que d'enjeux faisait d'elle une figure emblématique d'une culture toxique. Au regard du mouvement me too, le livre prend ainsi une dimension dépassant sans doute le projet de Joyce Carol Oates. Son héroïne s'émiettant progressivement, ironiquement - plus elle devient célèbre, plus elle semble se dissoudre -  évoque irrésistiblement ces vers de Bob Dylan « She takes just like a woman/Yes, she makes love just like a woman/Yes, she does, and she aches just like a woman/But she breaks just like a little girl. »

Un livre de Joyce Carol Oates. (Le Livre Poche, 1110 pages). 

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