Le Pitti Uomo à l'ère du digital
Le rendez-vous par excellence de l'homme n'est plus seulement à Milan, Londres ou Paris lorsque l'on parle Fashion Week. Il est aussi (et de taille), à Florence. Son nom ? Le Pitti Uomo. Cet été encore, alors que la douce torpeur des 25°C franchis s'immisce peu à peu dans la ville où naquit la Renaissance, c'est une incroyable fourmilière qui se déploit du côté de la Fortezza da Basso. Une marée d'hommes en costume trois pièces, de cool kids sapés en as on runway, de voluptueuses italiennes en robe du soir alors que les douze coups de midi viennent de sonner, qui ne faiblit pas de saison en saison. Il n'y a qu'à voir les courbes de croissance insolentes de la fréquentation du Pitti Uomo : +24% de buyers américains par rapport au cru 93, +6% pour le Royaume Uni, +13% pour les Pays Bas, +7% pour la France. Car au delà d'être une véritable messe mode pour la presse internationale, le Pitti Uomo est surtout un rendez-vous business très important où se joue l'image d'une collection et les prémices d'une réussite totale pour une jeune marque fraîchement débarquée sur le marché. Comptabilisant plus de 19.000 acheteurs internationaux pour cette édition, le Pitti Uomo est sans conteste un hub d'un autre genre qui redore le blason du salon professionnel, à l'heure où la plupart des concepts du genre cherchent désespérement à se réinventer. La raison ? Un nombre croissant d'évènements qui quadrillent la ville, de grands noms du style qui y prennent leurs quartiers, et dynamitent le programme par leur exclusivité et leur rayonnement. A l'image de Moncler, qui amorce le nouveau chapitre de Moncler Genius - concept visant à remplacer les défilés par des manifestations créatives en collaboration avec des artistes de renom - avec Hiroshi Fujiwara, aka Fragment, un musicien, producteur de disques et designer japonais, lequel revoit avec son pragmatisme utilitaire l'ADN de la maison franco-italienne et réivente l'idée même d'outdoor estival. Mais aussi de Roberto Cavalli, qui inaugure sa première collection homme imaginée par Paul Surridge sur les hauteurs de la ville. Ou de Craig Green, designer le plus prometteur de sa génération, qui s'émancipe pour la première fois du calendrier londonien pour dévoiler son printemps-été 2019 au coeur des Jardins Boboli, imaginés par les Medicis époque Éléonore de Tolède.
En plus de cette programmation pointue et internationale, l'idée était également de faire basculer le Pitti Uomo dans l'ère digitale. Depuis trois saisons, le salon florentin a développé l'application MyPitti, qui reprend l'ensemble des évènements et exposants de manière numérique, et offre un contenu photo et vidéo exclusif pour chaque manifestation. Une sorte de guide interactif et intelligent, qui hisse l'expérience d'un cran et promet une véritable continuité dans le cap sur le futur de l'entité italienne. Les réseaux sociaux ne sont également pas en reste, puisqu'aujourd'hui, le compte Instagram Pitti Imagine comptabilise pas moins de 150k followers, et met en scène les grands rédacteurs ou influenceurs présents sur les lieux, jour après jour. Le hashtag #pittiuomo lui dépasse les 630k publications, soit seulement 30.000 de moins que la Milan Fashion Week, homme et femme confondus. Une notoriété croissante et organique qui, sans faire de l'ombre à la semaine de la mode milanaise, renforce l'aura du made in Italy et de l'excellence des prestations que la Botte apporte depuis toujours au marché du luxe. Cette année marque également l'arrivée de magnats des réseaux aux premiers rangs des défilés : Luka Sabbat, Gabriel Kane Day Lewis ou Eric Underwood se partageaint le premier rang du défilé Roberto Cavalli par Paul Surridge. Une nouvelle manière d'appréhender la culture masculine, plus encline à la mutation digitale, et réalisée de manière assez smart pour que la foire aux vanités numériques n'aie pas lieu d'être. En somme, un juste équilibre entre pros, initiateurs de talent, designers et coqueluches du like, qui ne perd pas en authenticité, et conserve les valeurs d'excellence intrinsèques au salon le plus ambitieux de la mode masculine.