L’OH : Vous êtes bilingue, en quelle langue rêvez-vous ?
JDLB : J’ai passé presque la moitié de ma vie dans des pays anglo-saxons, et je parle plus en anglais qu’en français, les rêves me viennent plus naturellement en anglais.
L’OH:Vous n’êtes jamais en panne d’inspiration ?
JDLB : Ça m’arrive rarement, je fais toujours dix trucs enmême temps. Je viens de finir le tournage, l’album va sortir,on prépare les clips, j’ai écrit un long-métrage avec la cinéaste Sylvie Verheyde, et aussi une série. Je suis du genre à lire deux livres en même temps, mais du coup, je mets longtemps à les finir! Je n’ai pas le temps de manquer d’inspiration.
K : J’essaie de créer quelque chose qui ait du sens. Je ne fais plus de la musique juste pour le principe d’en faire. Il faut qu’il y ait une motivation plus grande, un impact. Si je ne me sens pas inspiré, je ne le fais pas. J’essaie de me challenger, pour avoir l’impression que c’est un territoire neuf, pour redevenir une éponge, recommencer de zéro, continuer à apprendre, me mettre en danger – c’est ça qui me pousse à continuer.
L’OH : Est-ce facile, sur un tournage, et qu’on est par ailleurs musicienne, et habituée à tout contrôler, de lâcher prise et d’accepter de n’être plus décisionnaire ?
JDLB : Non. Mais quand on décide de travailler ensemble, avec un réalisateur ou une réalisatrice, la confiance est essentielle.Sur un tournage, j’ai l’impression d’être dans une démarche collaborative, de créer le personnage avec le ou la cinéaste. Je me dis que si l’on s’est choisi, c’est que l’on se plaît.
K : Pour être honnête, pas tout le temps ! Mais quand c’est un travail collaboratif, je me sens à l’aise, c’est comme ça que je travaille quand je fais de la musique. Qu’il y ait des opinions divergentes, que l’on puisse faire entendre son point de vue passionnément, cela peut aussi être un bon environnement de travail en studio. C’est le cas sur Top Boy ,même si à la fin de la journée, une seule personne doit trancher.
L’OH:Comment se sont passées vos scènes communes ?
K : C’était extra de bosser avec Joséphine. Elle a apporté une fraîcheur à la série. Mon personnage, au moment où ils se rencontrent, se terre dans son coin, se tient éloigné de tout le monde, et elle apparaît sans cesse dans son univers... Entre les scènes, on parlait beaucoup de musique, de la façon dont nous nous exprimons dans des territoires artistiques différents.
JDLB : Kano est un acteur consciencieux. Il arrive préparé et reste concentré toute la journée. C’est toujours agréable de jouer en face d’un bon acteur, et là j’avais en face de moi quelqu’un de doué. Il fait des propositions différentes et intéressantes à chaque prise, ce qui me pousse aussi à inventer, explorer. Et nous parlions beaucoup de musique entre les scènes...
L’OH : Dans vos parcours, par qui avez-vous été le plusimpressionnés ?
JDLB : Bertrand Tavernier, avec qui j’ai tourné mon premier film, La Princesse de Montpensier. Il donnait l’impression de mettre en scène chaque élément de son film. Il avait une immense connaissance de l’histoire du cinéma, et la partageait généreusement. C’était un grand moment. Harvey Keitel aussi, rencontré sur le tournage de Madame, d’Amanda Sthers, Rowan Atkinson, aussi, connu sur Johnny English Reborn.Il est un peu comme Chaplin, Tati ou Jim Carrey, il est de ces acteurs qui créent un univers sans rien dire. Il est très méticuleux, il prépare tout. J’ai eu beaucoup de chance de voir comment ils travaillaient.
K : L’acteur Stephen Graham [exceptionnel comédien, vu dansThe Virtues, Time ou plus récemment The Chef,ndlr]. J’ai énormément de respect pour lui, j’ai eu la chance d’avoir des discussions passionnantes avec lui.
L’OH : Quel est votre rapport avec la mode ?
JDLB : Il a changé. Adolescente, je m’habillais en fonction de ce que j’écoutais, du grunge, puis du hip-hop, puis du rock, et après j’ai tout mélangé ! Je ne suis pas tellement les tendances, je suis plutôt des designers, comme Simone Rocha, Dilara Findikoglu, Charlotte Knowles.
K : Celui de mon personnage est inexistant ! Je ne suis pas à proprement parler un fashionista, mais je suis attentif à ce que je porte. Cela va du sportswear au tayloring super chic, des costumes sur mesure. Dunhill vient de m’en faire un.