Camille Charrière : "Je ne me considère surtout pas comme le guru du bon goût"
Chroniqueuse et consultante, réunissant un million de followers, le parcours de Camille Charrière est l’archétype d’une success story. On l’a suivi des défilés Haute Couture jusqu’à la Riviera.
Photographie Fiona Torre
Stylisme Jennifer Eymère et Kenzia Bengel Devaulx
L’OFFICIEL : Diplômée d’un master en droit, vous vous êtes d’abord lancée dans la finance avant de devenir cette femme d’influence que vous êtes aujourd’ hui, racontez-nous cette reconversion…
Camille Charrière : J’ai pris l’habitude de raconter que je suis venue vivre à Londres pour rejoindre un Anglais – une relation qui n’a pas fait long feu, mais qui m’a quand même valu une happy ending (je vous préviens, je fais plein d’anglicismes, c’est le prix à payer pour avoir passé dix ans outre-Manche) puisque je suis tombée éperdument amoureuse de cette ville excentrique et dynamique. Tu te sens pousser des ailes à Londres. Ce n’est pas un mythe, la capitale a vraiment une énergie qui te prend aux tripes, et les Anglais ont ce truc intangible qui te pousse à ne pas te conformer à la masse. Malheureuse à travailler dans la finance qui ne me correspondait pas du tout, j’ai ressenti pour la première fois que je pouvais sortir du sentier tout tracé auquel mes études de droit me destinaient. Je suis donc partie voir ce qui se passait du côté de la mode, sans piston, sans stratégie et sans savoir comment j’allais payer mon loyer. Au grand désarroi de mes proches d’ailleurs, qui m’en ont longtemps voulu de tourner le dos à cette carrière dite “sérieuse”. La suite, vous la connaissez.
L’OFFICIEL: Vous sentez-vous plutôt influenceuse, journaliste, businesswoman ?
C.C. : Bonne question. En fait, vu mon parcours atypique, j’ai du mal à définir mon métier. C’est un peu cliché, mais je suis une millennial, on est la génération slasher. Je suis donc chroniqueuse/influenceuse/styliste/consultante. Pour faire simple, je dis que je travaille dans les médias.
L’O : Votre influence sur les réseaux sociaux a commencé avec votre blog Camilleovertherainbow. Racontez-nous cette histoire…
C.C. : Je me suis servie du blog que j’alimentais durant mes pauses déjeuner pour prendre mes marques et me faire connaître dans un monde que je ne connaissais pas du tout. Le blason, Over the Rainbow, signifiait que la mode était vraiment un univers parallèle à ma vraie vie, un truc que je faisais pour le fun. Je ne voulais pas qu’on puisse me retrouver via mon nom de famille. Une fille dans la finance qui parle chiffons sur la toile, ce n’est pas crédible. Du moins, c’est ce que je me disais à l’époque. C’était mon espace créatif anonyme. Grâce à lui, j’arrondissais mes fins de mois. Je n’imaginais pas du tout la direction que ma vie online prendrait, même si j’ai tout de suite compris la valeur de construire une communauté.
L’O : Comment arrivez-vous à conjuguer votre passion pour la mode, une industrie qui fait tout pour être moins polluante mais qui l’est encore, et vos engagements pour l’environnement ?
C.C . : Je fais comme tous ceux qui adorent les fringues et qui ont une conscience : j’essaye de repenser intelligemment mon rapport à la consommation. Je me dis qu’à chaque achat je vote avec mon porte-monnaie, donc j’essaye de mieux choisir les créateurs et les marques que je soutiens. Finalement, cette pandémie aura eu le mérite de me réconcilier avec la mode dans le sens où elle a renforcé ma conviction que s’habiller est un acte d’expression et de survie. Ce sont les jours où je me sentais en chute libre que je prenais vraiment soin de bien choisir ce que je portais.
L’O : En quoi votre style est-il éthique ?
C.C. : Mon objectif, cette année, est d’augmenter la durée de vie de mes vêtements et d’acheter moins. Le principe que je me répète sans cesse est celui du fondateur de Parley for Oceans, Cyrill Gutsch : “Quand on jette un vêtement, il ne disparaît pas par miracle. Il atterrit forcément dans la nature.”
L’O : Votre Instagram est géré comme une plateforme média. Pouvez-nous en expliquer ces spécificités ?
C.C. : Je vois mon métier comme celui d’un curateur. J’essaye d’utiliser ma voix pour amplifier celle des gens qui m’inspirent, des designers aux activistes, en passant par les restaurateurs, les hôteliers, les écrivains ou les podcasteurs.
L’O : Vous êtes une habituée des frontrows, de quels designers vous sentez-vous proche ?
C.C. : Marcia, Grace Wales Bonner, Nensi Dojaka, Supriya Lele, Ludovic de Saint Sernin, Nicola Lecourt Mansion et Coperni. Sans oublier la maison Prada, évidemment.
L’O : Quel est le style de Camille Charrière, celui que toutes les maisons s’arrachent ?
C.C. : Je reprendrais les mots de l’une de mes créatrices préférées, Cate Holstein, fondatrice de la marque Khaite, “ feminine, timeless, twist of trash” (féminine, intemporelle, un brin trash). J’injecte beaucoup de second degré dans mes tenues. Je ne me considère surtout pas comme le guru du bon goût. Je ne cherche pas à faire du sans-faute. Au contraire !
L’O : Qui sont vos icônes en matière de style ?
C.C. : Lady Diana, les sœurs Olsen, Obama, Jane Birkin, Zoe Kravitz, Sharon Tate…
L’O : Vous allez vous marier prochainement avec le producteur François Larpin. Pouvez-vous nous parler de votre rencontre ? Comment vous a-t-il fait sa demande ?
C. C. : Il n’aime pas trop que je raconte donc je vais me contenter de vous dire que c’était au même endroit où il m’a dit je t’aime pour la première fois, un spot hors du temps, en Sicile, où l’on se croirait encore dans les années 60, ma période fétiche. Il a fait sa demande le soir de mon anniversaire, et si j’avais su je me serais sûrement accoutrée autrement. Je portais une robe ultracourte avec une paire de Converse.
L’O : Quelle est la chose la plus difficile dans l’organisation d’un mariage ?
C.C. : En ce moment, tout simplement avoir le droit de réunir plus de six personnes au même endroit.
L’O : Y a-t-il un mariage, réel ou fictif, qui vous inspire ?
C.C. :Mamma Mia, à dos d’âne, superkitsch et pittoresque. Je suis fan de comédies musicales donc un flashmob ne me déplairait pas. Façon rassemblement éclair convenu puis dispersion.
L’O : Pouvez-vous nous donner quelques détails sur votre robe, votre bague de fiançailles…
C.C. : Je pourrais vous répondre par ce proverbe anglais que l’on a coutume de dire à une future mariée : “Quelque chose de vieux, quelque chose de neuf, quelque chose d’emprunté, quelque chose de bleu et un penny d’argent dans sa chaussure.” Plus sérieusement, la bague est une pièce rétro sertie de diamants de chez mon joaillier favori (Cartier, ndlr), qu’il a choisi seul. Pour le reste, je vous réserve la surprise.
L’O : Oiseau de nuit, comment voyez-vous la soirée de votre mariage ?
C.C. : Ceux qui me connaissent savent que je suis toujours la première et dernière sur le dancefloor. Aller danser a été la chose qui m’a le plus manqué durant cette année compliquée. La musique fait la différence entre un bon moment et une soirée inoubliable. J’ai grandi entre Paris et Londres, j’ai des amis un peu partout dans le monde, la plupart ne se connaissent pas donc le mélange va être explosif.
Coiffure et Maquillage Emilie Green
Assistant photo : Pierre Nowak.
Remerciements à la Villa Green Galaxie
Polaroids : Camille Charrière en robe CHANEL et tongs HAVAIANAS.
Stylisme : Jennifer Eymère et Kenzia Bengel de Vaulx
Casting : Jennifer Eymère
Photo : Jennifer Eymère