Portrait Jules Faure
L'OFFICIEL: Pouvez-vous nous rappeler l’ADN de Festen? HUGO SAUZAY: C’est la question la plus dure parce qu’il n’est jamais simple de mettre des mots sur son travail. Mais si on doit résumer, on est une agence de décoration d’intérieur qui travaille sur des bâtiments existants dont on réinvente l’histoire. Notre métier est un lien entre ce qui s’est passé, ce qui se passe et ce qui se passera plus tard. On ne veut pas imposer un style. On travaille essentiellement avec des matériaux naturels, et on a une approche locale. On souhaite être cohérents et justes avec les projets que l’on nous propose. On aime aussi l’imperfection, la patine, les choses qui ne sont pas trop lisses. CHARLOTTE DE TONNAC: On rénove des lieux, sans faire de pastiche. On aime bien sentir l’histoire et le temps passé. On fait des ajustements, jamais de “total look”. HS: On aime bien composer et rester assez libre dans nos choix.La principale qualité que nos clients nous reconnaissent c’est le respect pour les lieux où l’on travaille, ils ont l’impression que les choses ont toujours été comme ça, comme si on n’avait rien fait,alors que, parfois, on a presque tout démoli... Ne pas vouloir être à la mode est la condition pour être intemporel. Cela peut paraître prétentieux car c’est la volonté de tout architecte, mais je pense qu’on nous appelle aussi pour cela.
L'O: Y a-t-il toujours une narration dans vos projets? HS: Elle nous est dictée par le lieu, elle dépend de la communication entre l’architecture, l’histoire, le contexte et les gens qui y vivent.
L'O: Les demandes de vos clients ont-elles changé avec la pandémie? C.D.T: Ce qui était déjà en marche et qui s’est vraiment accentué c'est le travail avec les artisans et les matériaux locaux. On ne va pas chercher un bois exotique à l’autre bout du monde pour le mettre dans un projet parisien. Notre démarche est d’essayer au maximum de travailler dans un circuit court. On avait déjà engagé cette démarche dans nos projets, c’était notre façon d’être responsables. On n’utilise pas forcément des matériaux très innovants, mais on récupère et on restaure au maximim. HS: Les choses qui traversent le temps sont des choses cohérentes. Nous ne sommes pas à la recherche de la parution. On vit dans un monde d’images où tout est photographié et jugé. L’hôtel des Roches Rouges à Saint-Raphaël, où nous sommes intervenus,n’avait pas été pensé pour cela et il l’est pourtant devenu. Après lui, on nous a beaucoup demandé d’imaginer des lieux aussi photogéniques. On a dû refuser une trentaine de projets parce quel’on ne voulait pas refaire la même chose. On s’est donc recentrés.
L'O:L’art contemporain a-t-il une place dans vos projets aujourd’hui? C.D.T : Il commence à en avoir une. Cela vient avec le client, mais c’est assez nouveau. Dans l’hôtellerie, il est difficile de l’intégrer pour des histoires d’assurance. Mais pour des clients privés qui on tune collection, on fait dialoguer la maison avec l’art. C’est l’habitat qui demande à la collection une évolution et pas l’inverse. Et dans ces cas-là, on travaille avec des curateurs puisque on a la culture, mais pas l'expertise.