Connue pour ses autoportraits, Carlotta Kohl a toutefois accepté de nous céder le contrôle et de jouer les muses pour nous à la villa mythique Vue de Rêve où les Kennedy ont séjourné.

Photographies : Edouard Plongeon&nbsp;

Parlez-nous un peu de vous. Qu’est-ce qui vous a donné envie de commencer à prendre des photos ?

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Carlotta Kohl: Mon p&egrave;re &eacute;tait un photographe de talent, et ma m&egrave;re, un mannequin des ann&eacute;es 1980- 90. Elle a travaill&eacute; avec des photographes g&eacute;niaux comme Paolo Roversi, Herb Ritts, Horst P. Horst, et a souvent pos&eacute; pour Helmut Newton. J&rsquo;ai grandi entour&eacute;e de photos. J&rsquo;aimais la mani&egrave;re dont une photo pouvait parler directement &agrave; mes &eacute;motions. C&rsquo;est presque comme ressentir de la nostalgie pour des exp&eacute;riences que l&rsquo;on n&rsquo;a pas v&eacute;cues. La photographie est un langage complexe. J&rsquo;ai commenc&eacute; &agrave; prendre des photos pour repr&eacute;senter ce que je voulais voir &ndash; un flou entre le fantasme et la r&eacute;alit&eacute; centr&eacute; sur un sentiment.&nbsp;

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J&rsquo;explore les th&egrave;mes du sexe, du d&eacute;sir et du corps&nbsp;comme objet. Je suis obs&eacute;d&eacute;e par la nudit&eacute; et ce que&nbsp;cela peut signifier. Ce qui fait que quelque chose est nu&nbsp;ou d&eacute;nud&eacute;, pur ou sexuel ? Je trouve cette dialectique&nbsp;fascinante et c&rsquo;est quelque chose qui m&rsquo;attire depuis mon&nbsp;plus jeune &acirc;ge. Mon travail para&icirc;t souvent doux en&nbsp;surface, innocent, rose bonbon, mais quand on creuse&nbsp;un peu on d&eacute;couvre des th&egrave;mes tr&egrave;s charg&eacute;s&nbsp;&eacute;motionnellement, de l&rsquo;agressivit&eacute;, de la col&egrave;re. Mon&nbsp;travail est une r&eacute;action au regard &eacute;troit de la soci&eacute;t&eacute;.&nbsp;C&rsquo;est une tentative de subvertir les clich&eacute;s et de r&eacute;v&eacute;ler&nbsp;des v&eacute;rit&eacute;s plus profondes concernant l&rsquo;exp&eacute;rience&nbsp;f&eacute;minine.

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J&rsquo;ai fait une &eacute;cole de photo parce que je voulais en faire&nbsp;mon m&eacute;tier. Avec le temps, je me suis sentie tr&egrave;s frustr&eacute;e par mon travail. Tout me paraissait si technique&nbsp;et distant. Je voulais vraiment que mon ressenti puisse&nbsp;s&rsquo;exprimer physiquement. Toucher, modeler. Pour&nbsp;moi, on a un plus grand sens de la connectivit&eacute; de l&rsquo;art&nbsp;quand on utilise ses mains. C&rsquo;est comme &ccedil;a que j&rsquo;ai&nbsp;commenc&eacute; &agrave; travailler l&rsquo;encaustique. C&rsquo;est une exp&eacute;rience tr&egrave;s cathartique de faire quelque chose avec ses&nbsp;mains. Chaque coup de pinceau, chaque coulure vous&nbsp;appartient. Vous avez enti&egrave;rement le contr&ocirc;le. Quand&nbsp;je fais ces peintures c&rsquo;est une exp&eacute;rience tr&egrave;s personnelle. Je suis seule, dans un garage &agrave; Long Island. La&nbsp;cire &eacute;tant un m&eacute;dium tr&egrave;s capricieux, je dois prendre&nbsp;des d&eacute;cisions tr&egrave;s rapides et, du coup, m&ecirc;me l&agrave; je n&rsquo;ai&nbsp;plus compl&egrave;tement le contr&ocirc;le. On abandonne le&nbsp;contr&ocirc;le et on trouve comment le r&eacute;cup&eacute;rer. C&rsquo;est ce&nbsp;va et viens qui rend les choses excitantes. Je suis sans&nbsp;cesse en train d&rsquo;apprendre quelque chose sur le m&eacute;dium et sur moi-m&ecirc;me.&nbsp;

On vous commande des autoportraits, parlez-nous de cette pratique. En quoi est-ce différent de poser pour quelqu’un d’autre ?

C&rsquo;est une exp&eacute;rience de la vuln&eacute;rabilit&eacute;. C&rsquo;est quelque chose qui demande un abandon total. Je ne supporte pas qu&rsquo;il y ait des spectateurs, &ccedil;a me met trop mal &agrave; l&rsquo;aise. Comme j&rsquo;ai le contr&ocirc;le, je d&eacute;cide de la mani&egrave;re&nbsp;dont je veux me pr&eacute;senter au monde et &ccedil;a, en soi, c&rsquo;est tr&egrave;s empowering. Cela dit, c&rsquo;est int&eacute;ressant parce&nbsp;que m&ecirc;me si on a l&rsquo;impression d&rsquo;avoir le contr&ocirc;le cr&eacute;atif absolu, il y a des limites. Je dois travailler avec un&nbsp;tripode, donc ce n&rsquo;est pas facile d&rsquo;essayer diff&eacute;rents angles de vue ou de nouvelles compositions. &Agrave; chaque&nbsp;fois que je veux essayer quelque chose de diff&eacute;rent, je dois tout r&eacute;installer. Je ne peux pas voir ce qui se&nbsp;passe dans l&rsquo;objectif pendant que je shoote, donc je fais des allers-retours pour regarder et ajuster en&nbsp;cons&eacute;quence. Mais quand quelque chose commence &agrave; marcher c&rsquo;est tr&egrave;s excitant, on peut voir que la photo&nbsp;est presque l&agrave;, presque actualis&eacute;e. Quand on arrive &agrave; ce stade, c&rsquo;est tr&egrave;s gratifiant. Quand on me prend en&nbsp;photo, je me pr&ecirc;te &agrave; la vision de l&rsquo;artiste. Je n&rsquo;ai pas vraiment mon mot &agrave; dire sur le plan cr&eacute;atif. Mais &ccedil;a a&nbsp;aussi sa beaut&eacute;. On essaye susciter quelque&nbsp;chose chez le photographe qui lui fasse d&eacute;clencher l&rsquo;appareil.&nbsp;

Quel est votre meilleur souvenir de St Barth ?

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C&rsquo;est certainement la plage de Saline. Quand mes amis et moi jouions dans&nbsp;les vagues, je me suis sentie transport&eacute;e en enfance. C&rsquo;&eacute;tait notre petit coin&nbsp;de paradis, c&rsquo;&eacute;tait du pur bonheur. J&rsquo;ai aussi bien aim&eacute; nos soir&eacute;es &agrave; l&rsquo;Eden&nbsp;Rock. La nourriture &eacute;tait excellente et la compagnie exceptionnelle.&nbsp;

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Vous avez été photographiée dans la villa où les Kennedy ont séjourné, quelles ont été vos impressions ?

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Absolument &eacute;poustouflant. La villa est remarquable. O&ugrave; que je regarde, je voyais quelque chose magnique. J&rsquo;adore les grands panoramas. Je pense que c&rsquo;est important pour les humains de voir l&rsquo;horizon. C&rsquo;est important pour notre bien-&ecirc;tre. La villa en elle-m&ecirc;me &eacute;tait tr&egrave;s agr&eacute;able &agrave; vivre. Elle&nbsp;donnait une impression &agrave; la fois accueillante et&nbsp;extravagante.&nbsp;

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Quel rôle jouent les réseaux sociaux dans votre vie ?

Ils sont formidables pour de multiples raisons. C&rsquo;est un d&eacute;bouch&eacute; pour moi &ndash; une possibilit&eacute; de m&rsquo;exprimer et&nbsp;de partager mon message. C&rsquo;est une plateforme qui permet de communiquer directement avec son public sans&nbsp;interm&eacute;diaire et &ccedil;a, c&rsquo;est quelque chose de tr&egrave;s puissant. Ce que j&rsquo;ai &agrave; dire n&rsquo;a besoin de passer par personne&nbsp;d&rsquo;autre, n&rsquo;a pas besoin d&rsquo;&ecirc;tre approuv&eacute; ni &eacute;dit&eacute;. Et puis il y a plein de gens qui m&rsquo;inspirent beaucoup sur&nbsp;Instagram. C&rsquo;est fascinant de voir comment certaines personnes voient le monde.&nbsp;

Carlotta Kohl : "J’explore les thèmes du sexe, du désir et du corps-objet"

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