Christie’s, nuit et jour

Inscrits depuis 2005 au rang des spécialités développées par Christies, l’art d’après-guerre et l’art contemporain ont défini un nouveau champ, prisé des collectionneurs comme des institutions. Issues en grande majorité de collections privées – françaises et internationales –, et parfois de musées étrangers (l’initiative n’ayant pas cours en France du fait de l’inaliénabilité des œuvres) les pièces dispersées ont atteint un record en 2017 (juin et décembre) des ventes d’art contemporain en France, totalisant un montant de 96.553.150 €.

Vente symbolique s’il est, la Vente du Soir (7 juin à 19h) rassemble 22 lots offerts par des artistes de premier plan au profit du Consortium de Dijon. Fondé en 1977 par Xavier Douroux et Franck Gautherot, cette tête chercheuse de l’art contemporain est installée depuis 2011 dans un édifice conçu par Shigeru Ban. Parmi les premières expositions organisées par le duo d’universitaires : Christian Boltanski (1978), Hans Peter Feldmann (1979), Annette Messager (1980), Cindy Sherman et Daniel Buren (1982), Carl Andre et Richard Prince (1983), Bertrand Lavier et Hans Haacke (1986)... Fort d’une approche visionnaire, le Consortium organisait dès le début des années 2000, la première exposition en France d’un grand nombre d’artistes américains (Christopher Wool, Kelley Walker, Rachel Feinstein, Josh Smith, Rachel Harrison, Wade Guyton, Joe Bradley, Roe Ethridge, Alex Israel, Oscar Tuazon...). Cette vente est ainsi une forme d’hommage à une entité que le New York Times qualifiait ainsi : “The under the radar French Museum that quietly predicts art’s next big thing”.

Ce même soir, à 19h, la vente de 25 lots d’art d’après-guerre rassemblera des œuvres d’artistes majeurs très recherchés (Nicolas de Staël, Hans Hartung, Pierre Soulages, Kazuo Shiraga, Alexandre Calder...).

Le lendemain, à 14h, aura lieu l’une des ventes du jour les plus importantes jamais tenues à Paris : une partie de la collection d’Arturo et Vera Schwarz, soit 225 lots, dispersée au profit du Israël Museum de Jérusalem. Grandes figures de l’après-guerre, mais également artistes contemporains (François Morellet, Gilbert & George, Bernard Frize, Mathieu Mercier...) devraient satisfaire les collectionneurs.

Quant aux peut-être-futurs-collectionneurs, ou simples amateurs d’art, rappelons que les ventes sont précédées d’une période d’exposition, durant laquelle tout un chacun peut accéder librement aux salles où sont montrées les œuvres. Parfois pour la première fois depuis de nombreuses années, avant de rejoindre à nouveau un intérieur privé.

Lot 7 : CHRISTOPHER WOOL. “Sans titre”, 2016, signé et daté “WOOL 2016” en bas, acrylique et sérigraphie sur papier, cette œuvre est unique, 76.2 x 55.9 cm. Provenance : don de l’artiste et de Luhring Augustine, New York. © Christie's images ltd. 2018. Estimation : 100.000 – 150.000€ (130.000 – 180.000$).

“Artiste américain d’ampleur internationale, Wool livre ici un témoignage d’amitié à l’égard du Consortium, premier centre d’art à avoir exposé son travail en France. L’œuvre présentée a pour origine une sérigraphie qu’il a réalisée en 2006 puis retravaillée à la peinture pour en faire une œuvre unique. L’artiste apprécie particulièrement ce rapport entre la sérigraphie – procédé de reproduction industrielle – et l’intervention.”

Lot 101 : WILLIAM NELSON COPLEY. “Loveland”, 1962, signé et daté “Cply 62” en bas à droite, titré “Loveland” dans la composition, huile et collage de dentelle sur toile, 89 x 116 cm. Provenance : Galerie Iris Clert, Paris, Collection Vera et Arturo Schwarz, Milan, acquis auprès de celle-ci en 1962, don de celle-ci au Israel Museum, Jérusalem, en 1998. © Christie's images ltd. 2018. Estimation : 40.000 – 60.000€ (50.000 – 74.000$).

“Très bon artiste américain, Copley est issu d’une famille aisée – son père possédait plusieurs sociétés, notamment de médias. Sans formation académique, il commence à peindre dans les années 1940, s’intéresse à l’art de son temps et au surréalisme, à tel point qu’il ouvre une galerie à Los Angeles sur cette période spécifique, ce qui lui permettra de rencontrer, dans les années 1950, toutes les figures majeures de ce milieu-là : Man Ray, André Breton, Marx Ernst... Plus tard, Copley créera une fondation qui, au fil du temps, se dotera d’une des collections les plus importantes sur le surréalisme. Son langage artistique est toujours assez décalé, empreint parfois d’une certaine drôlerie. L’œuvre que l’on présente fait partie d’une série réalisée au début des années 1960, qui fut exposée à la célèbre galerie Iris Clert. Il réadapte ici le drapeau américain dont il détourne les codes. Copley est notamment présent dans les collections de la Prada Fondazione à Milan qui lui a consacré une rétrospective il y a un an.”

Lot 171 : BERNARD FRIZE. “Non”, 2006, signé, titré et daté “2006 54 “Non” Bernard Frize” sur le revers, mine de plomb, acrylique et résine sur toile, 165 x 165 cm. Provenance : Galerie Micheline Szwajcer, Anvers, acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel. © Christie's images ltd. 2018. Estimation : 20.000 – 30.000€ (23.502 – 35.253$).

“Bernard Frize est un artiste français abstrait que l’on apprécie particulièrement chez Christie’s. Cette œuvre de 2006 est emblématique de son travail, un mélange d’acrylique et de résine qui donne ces surfaces très particulières. L’artiste joue sur la texture-même de la matière pour créer un effet de transparence. Son travail est défendu par la galerie Perrotin, et une grande rétrospective est prévue au Centre Pompidou en 2019. Variée et très intéressante, son œuvre bénéficie d’un marché constant : collectionneurs français et internationaux aiment à être tenus informés des œuvres de Frize disponibles à la vente.”

Lot 176 : MATHIEU MERCIER. “Diamant”, 2005, signé et daté “Mercier 2005” au dos, huile et acrylique sur toile, 150 cm (diamètre). Provenance : Galerie Chez Valentin, Paris, acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel. © Christie's images ltd. 2018. Estimation : 18.000 – 25.000€ (21.079 – 29.276$).

Lot 179 : MATHIEU MERCIER. “Sans titre (lascaux 944/924 sur fond Unik 012- 1A)”, 2014, acrylique sur toile, triptyque, (i) 226 x 44.5 cm, (ii) 240 x 153 cm, (iii) 203.5 x 61 cm, ensemble : 240 x 250 cm. Provenance : Galerie Torri, Paris, acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel. © Christie's images ltd. 2018. Estimation : 15.000 – 20.000€ (17.566 – 23.421$).

“Mercier fait également partie des artistes que nous aimons montrer à nos collectionneurs internationaux, via nos catalogues. Le tirage de 5 000 à 6 000 exemplaires nous permet de toucher un vaste panorama de collectionneurs, et nous sommes toujours heureux de répondre aux demandes d’informations régulières de plusieurs d’entre eux sur les œuvres de Mathieu Mercier. Passé ce premier cap de la séduction pure de l’œuvre, c’est une occasion d’évoquer plus en détail la démarche de l’artiste, lauréat du prix Marcel Duchamp en 2003.”

Lot 185 : TONY CRAGG. “Red square”, 2013, signé du monogramme de l'artiste en bas, bronze, 80 x 85 x 75 cm. Provenance : Buchmann Galerie, Berlin, acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel. © Christie's images ltd. 2018. Estimation : 80.000 – 120.000€ (94.010 – 141.015$).

“Tony Cragg, lauréat du Turner Prize (1988), fait partie des sculpteurs et plasticiens britanniques parmi les plus connus et recherchés. Cette œuvre, très intéressante, est peu montrée, il s’agit d’un bronze traité par l’artiste pour parvenir à ce rouge pigmenté, très mat. Toutes les caractéristiques du travail de Cragg y sont soulignées, recherche biomorphique, évolution des formes, mais en même temps prise directe avec la géométrie. L’artiste résout des problèmes de conception de l’œuvre d’art, notamment en cherchant à donner une forme complexe à une matière telle que le bronze. Cragg est un artiste à la fois célébré par les musées et les collectionneurs internationaux.”

Lot 222 : CHIHARU SHIOTA. “State of being (Picture Frames)”, 2012, signé des initiales “Ch S” à l'arrière, fils de coton noirs, cadres et métal, 120.5 x 80 x 50 cm. Provenance : Galerie Daniel Templon, Paris, acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel. © Christie's images ltd. 2018. Estimation : 15.000 – 20.000€ (17.566 – 23.421$).

“Cette artiste japonaise est porteuse d’une forte identité esthétique : fils de coton tressés, tissés pour des œuvres murales ou des sculptures dans lesquelles elle emprisonne des objets du quotidien, en l’occurrence, ici, des cadres. A l’hiver 2017, le Bon Marché avait accueilli sa fameuse installations Where are we Going ? ”

Lot 242 : GINA PANE. “Action Psyché”, 1973_1974, (i) signé, titré et daté ““Projet pour action psyché/essai” 1973 Gina Pane” en bas à droite, numéroté “1 A.P” en bas à gauche, (ii) à (xxiv) : inscrit “9 AP” en bas à droite, numéroté en bas à gauche, (xxv) numéroté “9AP” en bas à droite, signé, titré, daté et inscrit : “25. “Action psyché/essai“ 24 janvier 1974 - Rodolphe Stadler Paris, pièce originale Gina Pane” en bas à gauche, (a) signé, titré, daté et inscrit ““Note pour Psyché/essai”, point de suture pour blessure 1973 Gina Pane” en bas à droite, (b) signé, titré, daté et inscrit ““Note pour Psyché (essai)” action 1973 Gina Pane” en bas à droite, ensemble de vingt-cinq photographies couleurs et deux dessins préparatoires, 48 x 57.5 cm (chaque feuille). © Christie's images ltd. 2018. Estimation : 20.000 – 30.000€ (23.421 – 35.132$).

“Artiste très engagée, elle fait partie des pionniers de la performance et de l’art corporel. Action Psyché (1973-1974) est une œuvre issue de l’ancienne collection de Rodolphe Stadler – galeriste très important des années 1970 à 1990 à Paris. Il a été l’un des premiers à montrer la performance, dont le travail de Gina Pane. Par définition, on ne peut pas vendre la performance en elle-même, mais des souvenirs ou des témoignages du jour de la performance. En l’occurrence, il s’agit d’une série de photographies réalisées sous le contrôle de l’artiste et annotées par elle. Gina Pane a constitué une importante source d’influence pour les nouvelles générations d’artistes de la performance et de l’art corporel.”

Lot 251 : ZAO WOU-KI. “Sans titre”, 1964, signé en Pinyin, signé en Chinois et daté “ZAO 64”, en bas à droite, aquarelle et encre sur papier, 76 x 56.5 cm. Provenance : acquis directement auprès de l'artiste par le propriétaire actuel. © Christie's images ltd. 2018. Estimation : 50.000 – 70.000€ (58.756 – 82.259$).

“Artiste chinois installé à Paris dans les années 1940, il a connu, en termes d’intérêt du marché, une évolution extrêmement forte ces dix dernières années avec l’émergence des collectionneurs asiatiques qui ont souhaité se réapproprier l’œuvre de cet artiste phare, le plus important de l’après-guerre pour l’abstraction. Cette très belle œuvre sur papier de 1964 correspond à l’une des périodes les plus recherchées, elle contient tout ce qui fait la force de l’abstraction de Zao Wou-Ki, suspendue à des endroits avec l’aquarelle, très concentrée à d’autres et violente dans la gestuelle. L’exposition que lui consacre le Musée d’art moderne de la Ville de Paris permet de revoir les grandes phases de travail de l’artiste.”

Lot 272 : JEAN FAUTRIER. “Tête striée”, 1940, signé et numéroté “fautrier 5/9”, à l'arrière, bronze à patine brune, cette œuvre porte le numéro cinq d'une édition de neuf exemplaires, 17 x 11.5 x 13.5 cm (sans base), 28.4 x 9.3 x 11 cm (avec base). Provenance : Galerie Bonnier, Genève, acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel en 1981. © Christie's images ltd. 2018. Estimation : 30.000 – 50.000€ (35.132 – 58.553$).

“Œuvre assez méconnue de Jean Fautrier, dont on connaît plus largement les peintures, cette sculpture intitulée Tête striée (1940) reprend son travail plastique de la matière, et annonce sa célèbre série Otages, développée à partir de 1943-1944, questionnant la manière de “représenter” tout en déformant la matière. Cette pièce illustre également le fait qu’une maison telle que Christie’s propose régulièrement des œuvres pour une grande variété de budgets. Ainsi, estimée entre 30 000 et 50 000€, elle est d’un prix très attractif comparativement à celui d’une toile de Jean Fautrier.”

Lot 313 : ALEXANDER CALDER. “Projet pour “ORTF À TOUS””, 1968, signé, titré et daté ““Calder 68 ORTF à tous”” en bas à droite, gouache sur papier, cette œuvre fut réalisée par Calder en soutien à l'ORTF durant les grèves de mai 1968, 136 x 76 cm. Provenance : vente anonyme, Neret-Minet Scp, Paris, 5 novembre 1994, lot 44B, collection privée, Paris, vente anonyme, Sotheby's, Paris, 9 décembre 2015, lot 138, acquis lors de cette vente par le propriétaire actuel. © Christie's images ltd. 2018. Estimation : 30.000 – 40.000€ (35.132 – 46.842$).

“Célébré pour ses mobiles et ses stabiles, Calder a également réalisé des œuvres sur papier d’une grande pureté, où l’on retrouve les éléments qui caractérisent sa sculpture : une simplicité, un équilibre, un minimalisme dans le traitement, une sélection de couleurs primaires jouant d’une palette réduite : bleu, rouge, noir et parfois du jaune. Clin d’œil à l’actualité, cette œuvre a été réalisée pour un projet d’affiche en soutien à l’ORTF lors des grèves de mai 68.”

Ventes d’art d’après-guerre et d’art contemporain

“Vente du soir”, le 7 juin à 19h
47 Lots allant du numéro 1 au 47.
Commissaire-priseur : François de Ricqlès.

“Vente du jour”, le 8 juin à 14h
225 Lots allant du numéro 101 au numéro 326.
Commissaires-priseurs :
Lionel Gosset, Camille de Foresta, Victoire Gineste

Exposition ouverte au public 
du 1er au 7 juin, de 10h à 18h

Christie’s
9, avenue Matignon, 75008, Paris
T. +33 (0)1 40 76 85 85
www.christies.com