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Le Bon Marché déroule le fil

Chiharu Shiota a déroulé ses fils immaculés dans l’enceinte du Bon Marché... Après une carte blanche confiée à Ai Weiwei l’hiver dernier, le grand magasin accueille ainsi l’œuvre de l’artiste japonaise, représentante du pavillon japonais à la Biennale de Venise 2015.
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Propos recueillis par Yamina Benaï

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Quel cahier des charges vous a été communiqué par les équipes du Bon Marché ?

L’un des éléments les plus décisifs a été la verrière, car elle fixe l’extrême limite en termes de poids de l’œuvre. J’ai donc travaillé à partir des mesures spécifiques de cette structure de 17 mètres de hauteur. Je souhaitais suspendre 150 bateaux, il m’a donc fallu recourir à des matériaux légers tels le métal pour l'armature, fils et colle.

 

Comment votre œuvre entre-t-elle en dialogue avec les espaces et les visiteurs ?

Montrer mes œuvres dans un grand magasin implique, évidemment, d’exposer l’art à un plus vaste public. Lorsque des personnes visitent un musée ou une galerie, elles font délibérément la démarche d’aller voir de l’art ; mais quand elles se rendent dans les magasins, elles ne s'attendent pas à avoir un rapport direct avec l’art, cet effet de surprise d'un public a priori non captif est à mon sens très intéressant. Dans la mesure où il modifie sensiblement son expérience d’achat. J’aime l’idée de combiner les deux concepts : le shopping et l’art. On peut estimer que lorsque les personnes entrent dans un magasin, c’est généralement parce qu’elles ont besoin d’un article particulier, mais parfois aussi parce qu’elles éprouvent un manque qu’elles ne parviennent pas à définir donc à combler.

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Ces embarcations, placées dans une dizaine de vitrines du magasin, ne sont pas sans évoquer les drames des migrants perdus en mer. A quel champ sémantique personnel correspond le bateau ? 

Les visiteurs tendent à lier mes bateaux aux questions sur les migrants et cela est en partie juste, mais pas uniquement. En effet, mon intention est de creuser loin dans la condition de l’Homme, de questionner son existence, d’interroger ce qui nous porte à la rêverie et à l’incertitude de la vie. Les bateaux symbolisent, à mes yeux, les différentes périodes de l'existence humaine. 

 

Comment se sont déroulées les phases d’installation de votre projet ?

Les bateaux ont été préparés en amont dans mon studio à Berlin, la suspension à la verrière constituait la phase finale de l’installation. Pour “Memory of the Ocean” où j’investis l’espace et les vitrines de la rue de Sèvres de fils entremêlés, nous avons dû travailler in situ ce qui s’est révélé assez complexe mais galvanisant au fur et à mesure que l’œuvre prenait forme.

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À VOIR :
“Where Are We Going”, Chiharu Shiota,
exposition du 14 janvier au 18 février,
Le Bon Marché Rive Gauche, 24, rue de Sèvres, Paris 7,
www.lebonmarche.fr

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